CAHIERS DE L'ATELIER HORS SERIE N°1

30/08/2012 21:57

La diaconie dans le dialogue entre charite et justice

S'attaquer aux causes de la pauvreté, un combat pour la justice                                                                                 
Diaconie, charité et justice... Il convient de retrouver une articulation entre ces trois mots, au regard des évolutions les plus récentes de la pensée de l'Église et des besoins des communautés chrétiennes.
Depuis l'encyclique Caritas in veritate, le lien entre justice et charité a été clairement défini, reprenant en cela des analyses antérieures que l'on retrouve dans Sollicitude Rei Socialis, dans les différentes déclarations du Conseil pontifical «Justice et Paix», ainsi que dans l'encyclique Centesimus Annus. Mais si, comme le dit l'encyclique Caritas in veritate, «la charité dépasse la justice parce qu'aimer c'est donner, offrir du mien à l'autre, la charité n'existe jamais sans la justice qui amène à donner à l'autre ce qui est sien » (C.A. n° 6), le concept de charité est profondément transformé par rapport à la vision première que peuvent en avoir des associations caritatives comme le Secours Catholique. Benoît XVI, après Paul VI, explique bien que la justice est la première voie de la charité, son minimum. C'est ce que reprend le Secours Catholique dans sa troisième orientation qui rappelle qu'il faut aussi s'attaquer aux causes de la pauvreté, et que là est le combat pour la justice. Mais la diaconie doit trouver sa place dans cette gradation de l'engagement de la justice vers une charité pleine et entière.
La diaconie, c'est le service du frère, de tous les frères, mais ce n'est pas spécifiquement une action, c'est une attitude générale de l'ensemble des communautés chrétiennes qui laisse sa juste place au service du frère dans la triple tâche (l'écoute de la Parole, la liturgie et la diaconie) que le pape Benoît XVI a rappelé dans l'encyclique Deus caritas est. Il ne faudrait pas que la diaconie, ou service du frère, soit une tâche isolée mais qu'elle trouve sa place dans l'ensemble de la vie des communautés. Là encore, l'un des enjeux de cette recherche traduite dans ce numéro hors-série des Cahiers de l'Atelier va être de voir comment elles peuvent et doivent devenir des communautés diaconales. Pour cela, il faudra que nous repartions de concepts comme celui de la fraternité. Il nous sera apporté un certain nombre de témoignages qui vont dans ce sens pour que ce mot de fraternité puisse rejoindre celui de diaconie. Comment la fraternité doit-elle dépasser la solidarité? Comment, à travers la fraternité, les communautés retrouvent-elles la totalité de l'expression de la foi chrétienne? Bien sûr nous ne pourrons pas répondre à l'ensemble des questions. Nous savons bien que, par la diaconie, nous devons sortir des églises, que le service du frère n'est pas le service du seul frère chrétien, mais le service de l'ensemble de nos frères. C'est pour cela qu'a été proposée cette démarche de Diaconia 2013 qui vise deux choses: la première est de remettre le service du frère au cœur de la mission des communautés sans renvoyer celui-ci aux organisations spécialisées ; la seconde est de remettre le pauvre, au sens évangélique, celui sur lequel personne ne jette un regard, qui est rejeté, étranger, qui n'est pas invité au repas de la vie, au cœur de la dynamique de nos communautés. Ces deux orientations guident le travail des diocèses, des mouvements et des services dans l'optique de Diaconia 2013. Il s'agit de mettre en avant des témoignages de ce que veut dire aujourd'hui vivre la diaconie dans l'église, dans des organisations liées à l'Église mais aussi dans celles de la société civile. Si l'on veut que les communautés deviennent effectivement des communautés diaconales, c'est-à-dire des «communautés serviteurs», elles doivent trouver leur place au sein de l'ensemble de la communauté humaine à l'intérieur de laquelle elles se trouvent. C'est pour cela que la démarche de Diaconia 2013 incite les communautés chrétiennes à regarder quelles sont les fragilités autour d'elles, quelle est la situation des plus pauvres, quelle est la responsabilité propre de la communauté chrétienne au sein de l'ensemble de la communauté humaine, locale ou professionnelle. C'est en faisant ce travail de regard sur la réalité que nos communautés pourront mieux définir la place du pauvre en leur sein. On s'apercevra sans doute qu'aujourd'hui si le pauvre est présent en paroles, il l'est peu en actes.
Aujourd'hui, la diaconie n'est pas la préoccupation essentielle des communautés chrétiennes alors qu'elle devrait être la clé de voûte de l'ensemble de leur vie. La démarche Diaconia 2013 a une dimension sociétale, c'est-à-dire qu'elle donne la possibilité et crée l'obligation pour les communautés chrétiennes de sortir de leur réalité ecclésiale pour se mettre réellement au service de l'ensemble de la communauté humaine. C'est en cela qu'elles doivent devenir «diaconales».

François SOULAGE,     président du Secours Catholique